Projet Climat: Une force qui tacle la sahélisation du Centre-ouest Burkinabè

mai 31st, 2020 | par afriktilgre@
Projet Climat:                       Une force qui tacle la sahélisation du Centre-ouest Burkinabè
Le fil vert
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Le projet climat, appelé également projet de renforcement des capacités d’adaptation et d’atténuation de 4 000 producteurs (trices) des communes de Koudougou et de Réo face aux risques de changement climatique, est parti du constat que la région du Centre-ouest, connue pour sa forte potentialité en ressources forestières, fait face, depuis quelques années, à une sahélisation progressive à cause des actions anthropiques destructives, et des effets néfastes des changements climatiques. Afin de contribuer à inverser cette tendance rebarbative pour la région, un consortium de trois structures, coordonné par l’association le Baobab, a décidé de repousser les limites de la désertification dans le Boulkièmde et le Sanguié à travers des activités de reboisement, de formation, de sensibilisation et de vulgarisation de techniques de régénération naturelle des sols.

Chaque année, le Burkina Faso perd une superficie de plus de 105 000 hectares de forêts et 400 hectares de terres. Ces chiffres alarmants, pour un pays dont la majorité de la population vit des activités agro-sylvo-pastorales, ne laissent pas indifférents les associations engagées dans la lutte pour la préservation de l’écosystème. Parmi ces structures figure l’association le Baobab. Depuis 20 ans, elle s’est donnée pour mission d’aménager des périmètres maraîchers, de réaliser des sites anti-érosifs (bandes en herbe et cordons pierreux), des fosses fumières, et de former des producteurs en techniques de production agricoles, selon les principes de l’agroécologie.

 L’association le Baobab intervient principalement dans la région du centre-ouest, où elle met en œuvre, actuellement, avec deux associations sœurs, le projet de renforcement des capacités d’adaptation et d’atténuation de 4 000 producteurs (trices) des communes de Koudougou et de Réo face aux risques de changement climatique. Ledit projet vise à renforcer les capacités d’adaptation des acteurs de l’agro-écologie au changement climatique, dans six villages du Boulkièmde et du Sanguié. Ces six villages sont entre autres Sankoincé, Nariou, Là (Boulkièmde), Kinkianly,  Bonyolo et Goundi ( Sanguié).

Le projet climat couvre six villages du Centre-ouest

Le Centre-ouest du Burkina Faso a l’avantage d’être une zone verdoyante, mais « ce statut de région à fortes potentialités forestières représente une épine à son pied, puisqu’elle constitue du même coup un réservoir de bois de chauffe pour des centres urbains comme Ouagadougou », soutient Fulgence Yaméogo coordonnateur de l’association le Baobab, pour justifier le choix de la région, pour la mise en œuvre du projet. Dans la suite de notre entretien, intervenu le mercredi 27 mai 2020, Fulgence Yaméogo a confié que les populations de la région subissent également les effets des changements climatiques, avec pour conséquences la dégradation des terres, des ressources en eau et la perte de la biodiversité.

Cette mauvaise exploitation des ressources forestières du Centre-ouest mixée aux effets pervers des changements climatiques ont amené le Baobab à prendre le taureau par les cornes, en développant des activités de sensibilisation et des initiatives communautaires, grâce au projet climat, afin d’éviter une sahélisation de la région, raconte Fulgence Yaméogo.

Cliquez sur le lien ci-dessus pour lire le bilan à six mois de mise en œuvre du projet

Le projet climat un outil au service de la protection de la biodiversité.

Avant toute chose, il convient de retenir que le projet climat vise spécifiquement à sensibiliser et renforcer les capacités des acteurs de l’agriculture familiale durable en gestion de la fertilité des sols, en protection et en gestion concertée des ressources  végétales. Il vise aussi à renforcer la couverture végétale, la biodiversité et la fertilité des terres des six villages grâce au reboisement, à la préservation des zones sauvages et à la restauration des sols.

En matière de sensibilisation des acteurs de l’agriculture familiale durable, le coordonnateur de l’association le Baobab a fait comprendre qu’une pièce de théâtre sur le thème des changements climatiques a été jouée en Mooré et en Lélé, les deux langues parlées dans les six villages bénéficiaires du projet. L’air relaxe dans son open office, Fulgence Yaméogo a laissé entendre que le théâtre a permis de sensibiliser 1500 personnes qui sont devenues des alliées du projet lors des activités de reboisement.

Fulgence Yaméogo coordonnateur de l’association le Baobab

Parlant de reboisement, notre interlocuteur d’un matin a déclaré que, depuis le début du projet, en 2019, des  sites individuels et des bosquets ont été reboisés dans chaque village avec près de 12 000 plants d’espèces locales. « Les bosquets constituent au moins 15 hectares par village, et les sites individuels dépendent de la capacité de chaque bénéficiaire », explique Fulgence. Pour avoir constamment des plants à sa disposition, le projet a formé dans chaque village deux pépiniéristes à la production d’arbres fertilisants comme le Baobab, l’acacia nilotica, l’acacia mellifera et bien d’autres espèces. Les pépiniéristes sont chargés d’aménager des pépinières villageoises sous la supervision de l’association le Baobab et de ses partenaires.

Cliquez sur le lien ci-dessus pour découvrir une pépinière du projet dans un village de Koudougou

Ces deux pépiniéristes font partis d’une équipe de cinq personnes qui constitue le point focal du projet dans chaque village. Tous les membres du point focal sont formés de sorte à ce qu’ils maitrisent les questions de l’agroforesterie (production et entretien des plants). Ils bénéficient aussi de renforcement de capacité en défense restauration des sols (réalisation de cordons pierreux, de zaï, de bandes herbeux, de demi-lunes etc.).

A la fin des différentes formations, les membres du point focal deviennent des canaux par lesquels les bénéficiaires du projet sont sensibilisés sur la préservation des zones sauvages (zones bien boisées) de leurs villages. En dehors de cette sensibilisation, les messages que ces points focaux transmettent à leurs communautés concernent également la bonne application des techniques de régénération naturelle et de conservation des eaux et des sols.

Prévu pour durer deux années, le projet climat compte récupérer 75 hectares de terres dégradées par an, à travers la réalisation de cordons pierreux, de demi-lunes, et de zaï, dans les zones les plus dégradées de ses lieux d’intervention. S’agissant de restauration des sols, le coordonnateur du Baobab a indiqué que « La question de restauration des sols se vit dans le long terme. Si  nous reboisons aujourd’hui, l’impact se ressentira dans quelques années plus tard. Depuis que notre association intervient dans le Centre-ouest, nous avons réussi à récupérer des terres dénudées qui sont devenues des terrains productifs. Au regard de ces résultats concluants de par le passé, nous comptons récupérer 75 hectares de terres dégradées avec le projet climat. ».

Le projet compte récupérer des terres dégradées dans le Centre-ouest

16 bénéficiaires du projet climat à l’école de la pratique des techniques de restauration naturelle des sols à Kinkianli

Pour joindre l’acte à la parole, le  14 mai 2020, de 9 h à 12 h, munis de pioches, de pelles et de houes, 16 bénéficiaires du projet climat ont appris à faire des zaï améliorés et des demi-lunes, grâce à l’expertise d’un formateur en agro-écologie du nom de Sam Tokoro Bacye. Ils étaient issus de Kinkianli, Goundi et Bonyolo. Coronavirus oblige, chaque participant disposait d’un équipement de protection individuel (cache-nez) et observait la distanciation sociale recommandée par les autorités sanitaires.

A notre arrivée à Kinkianli, le village qui abritait la formation, en compagnie du coordonnateur de l’association le Baobab, Sam Tokoro Bacye la trentaine bien sonnée, visiblement à l’aise avec ses apprenants a d’emblée précisé que, cette phase pratique fait suite à une première formation théorique qui s’est tenue la veille sur plusieurs techniques de restauration naturelle des sols, parmi lesquelles il a cité les cordons pierreux, les diguettes, la plantation d’arbres fertilisants, les haies vives, les techniques de compostage, et bien-sûr le zaï et les demi-lunes. En fin défenseur de l’agro-écologie, Sam Tokoro Bacye n’a pas hésité à nous dire, avec le sourire aux lèvres, que l’avènement des changements climatiques commande que l’homme prenne du temps pour redonner vie à la terre, afin qu’elle puisse le nourrir.

Retrouvez ici le résumé de la formation en vidéo

Après avoir prêté une oreille attentive au formateur du jour, nous avons dirigé notre micro vers les bénéficiaires. Florence Kanyala, productrice venue de Bonyolo, a saisi cette occasion pour affirmer qu’une telle séance de formation lui permet de se rappeler des techniques qu’elle a oublié avec le temps, puisque cela fait trois ans qu’elle participe à des sessions d’initiation aux techniques de restauration et de conservation des eaux et des sols. « Je repars chez moi avec la certitude de pouvoir appliquer objectivement les techniques apprises. » finit-elle par lâcher. Dame Kanyala a même promis de commencer avec le zaï amélioré et la plantation d’arbres fertilisants dans son champ, ou tout autour.

Si Florence Kanyala penche beaucoup plus pour le zaï amélioré, Assami Kinda, un autre bénéficiaire, affiche son amour pour les cordons pierreux. Il voit en cette technique l’ultime solution qui permettra à son exploitation d’être productive. En bon apprenant, Assami Kinda a déclaré qu’il compte bien transformer son champ en véritable espace de témoignage de la viabilité des systèmes agro-écologiques.

Une vue des zai améliorés et des demi-lunes réalisés par les bénéficiaires à Kinkianli

Avant que nous ne démarrions pour regagner Ouagadougou, le coordonnateur du Baobab a tenu à préciser que, la fin du projet climat ne provoquera pas l’arrêt des reboisements, de la préservation des zones fertiles ou de la pratique des techniques de récupération des sols. Il a promis que des animateurs seront toujours aux chevets des bénéficiaires, afin de leurs permettre de continuer à mettre en œuvre les techniques apprises, même au-delà des deux ans que durera le projet.

Sougrinoma Ismaël GANSORE

4 Comments

  1. El Hadji says:

    Beau reportage

  2. ZONGO G ROLAND says:

    Très intéressant comme projet .bon travail cher

    confrère

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